Kōgi 講義

Le Kogi est un cours magistral sur un thème choisi, aujourd’hui une pratique quasiment oublié en judo, mais pourtant l’un des 4 piliers de la méthode créé par Jigoro Kano.

Le kōgi, en tant qu’une des méthodes pour enseigner le jūdō, ne doit pas faire défaut.

Le kōgi講義 est un des quatre éléments de la pratique qui doivent permettre que l’expérience du jūdō soit source des bienfaits que Kanō Jigorō promet.

Kō 講 et Kanō Jigorō

La première chose que l’on peut noter est que, dans kōgi, on retrouve le caractère kō 講, le même que dans Kōdōkan 講道館. Cela n’est certainement pas fortuit et dénote, chez Kanō, d’une véritable attirance pour cet exercice qui consiste à « faire en sorte que par la parole (言) les deux parties s’accordent et parviennent à la même compréhension ( 冓 )» . Il s’agit donc d’utiliser la parole pour rapprocher les hommes par l’intellect.

Le Dictionnaire historique du Japon donne les indications suivantes quant à l’origine de l’emploi du terme kō :A l’origine, le terme kō désignait une assemblée de moines lettrés, versés dans l’étude du canon bouddhique, ainsi qu’une cérémonie cultuelle (hōe 法会); mais par suite de la popularité de l’assemblée de la lecture des huit rouleaux du Sūtra du Lotus (Hokke hakkō 法華八講) qui vénérait ce sūtra, le sens de kō s’élargit et désigna un groupement religieux. Finalement, l’on peut dire que ce terme en vint à nommer tout groupe constitué en vue d’un but particulier.

Ainsi, l’emploi de kō, s’il désigne au départ une habitude de rassemblement pour l’étude dans le bouddhisme, finit par désigner toute assemblée de personnes mues par le même intérêt.

  • Expression bouddhique. Réunions pour parler de ou interpréter les textes sacrés bouddhiques. Ou encore, cette interprétation elle‐même.
  • Rassemblement de fidèles qui se réunissent dans un but commun. Ou encore, cette organisation.
  • Le fait que des personnes ayant les mêmes objectifs se rassemblent dans un but précis, comme par exemple progresser dans un art. Ou
    encore, ces réunions.

Quant à kōgi, terme qui n’apparaît pas dans les deux derniers ouvrages cités, le Kanji-gen donne pour première acception : Dévoiler (résoudre / démêler) le sens ou le contenu d’une théorie, d’un livre.

Si le Kōjien donne une première acception équivalente, il rappelle dans la deuxième qu’il s’agit « également d’une façon de désigner tout cours d’université ».

Kōgi : le cours magistral

Le kōgi, dans ce sens de cours magistral, a toujours été un des exercices favoris de Kanō Jigorō. On peut même aller jusqu’à parler de passion : cet exposé où l’on fait profiter l’autre de ses connaissances, où on les organise pour qu’elles prennent vie chez l’auditeur font partie intégrante du travail d’enseignement et du plaisir de l’enseignant.

De même, à Tōkyō, et même quand j’étais étudiant à lʹuniversité, il mʹest souvent arrivé de donner aux élèves des classes inférieures des cours (kōgi) à propos de différents ouvrages. Cʹest parce quʹenseigner a toujours été, pour moi, une sorte de plaisir.

Or, du début des années 1880 à sa mort, Kanō Jigorō a multiplié les occasions : soit en tant que professeur dans les écoles publiques ou celles de sa création (encore et toujours ce besoin de transmettre, d’expliquer), soit au travers de conférences.

Kōgi : l’exposé d’une problématique

Le kōgi représente aussi l’espace et le moment propices pour mettre à plat les faits d’une situation complexe et pour proposer une solution, puis l’exposer à la critique. Cela, pour Kanō Jigorō, doit non seulement accompagner la réflexion mais relève même de la responsabilité des personnes en charge d’un problème particulier, surtout si celui-ci intéresse la nation entière.

En ce qui concerne la relation établie dans l’éducation d’aujourd’hui entre éduquer le spirituel et la profusion des connaissances, l’étude est vraiment insuffisante. Quel que soit le pédagogue, quel que soit le professeur d’école, il n’en est pas un pour avoir clairement analysé ce problème et en faire conférence (kōgi). Pourtant, il faut absolument étudier cela tout à fait minutieusement.

Kōgi et science

Fasciné par ce que véhicule l’idée de kō 講 , poussé par ce besoin d’expliquer, de partager ses réflexions, c’est tout naturellement que Kanō introduit cet élément dans la vie du dōjō et du pratiquant de jūdō. On peut comparer la deuxième acception du terme kōgi par les deux dictionnaires déjà cités et la définition que Kanō Jigorō fait du jūdō dans un article de novembre 1898 :
– Expliquer une science et l’enseigner
– Les professeurs traitent d’une partie de leur science, de leur recherche.

Ainsi, dans les deux cas, le terme utilisé est gakumon 学問, science. Or :

Pour les raisons évoquées petit à petit jusqu’ici, le Kōdōkan jūdō est bien le résultat d’une étude dont la base est le jūjutsu ancien mais c’est depuis le début une science (gakumon) indépendante dont le but est clairement à la fois la pratique du combat ainsi que le renforcement de l’esprit et du corps, et n’est pas une école du jūjutsu ancien.

Si le jūdō est une science, alors il est tout à fait légitime que le kōgi fasse partie de ses moyens pédagogiques.

Un temps pour tout

Dans les sciences, s’il y a le temps de l’expérience, il y a également le temps de la réflexion. Il en va de même en jūdō, où les allers et retours entre pratique et théorie sont incessants. Incessants et nécessaires, certes, mais peuvent-ils être confondus ?

A l’occasion de l’entraînement au randori ou au kata, comme notre esprit est principalement tourné vers l’exercice pratique, les principes ont du mal à passer et comme, en outre, on écoute de façon entrecoupée, il s’ensuit que l’on écoute certaines choses avec attention tandis que d’autres nous échappent.

Ainsi, associer trop étroitement la mise en application, exercice du corps, à la théorie, exercice intellectuel, pose un problème de concentration. Il convient donc d’accorder à chacun un temps qui lui est propre.

C’est pourquoi il est difficile de comprendre les véritables choses au travers de discussions entrecoupées entre les exercices. Il est nécessaire de pouvoir développer le discours pendant un temps suffisant.

S’il y a besoin de temps différents, c’est-à-dire de moments différents, le kōgi nécessite également un temps suffisant. En effet, le jūdō étant complexe, il faut pouvoir en exposer les faits et les arguments les uns après les autres, en suivant une démarche pédagogique, pendant tout le temps nécessaire.

En outre, comme ce que l’on doit enseigner à propos de l’attention et des efforts qui concernent le renforcement de l’esprit et du corps, est extrêmement vaste et qu’il faut y passer beaucoup de temps, aussi faut‐il absolument enseigner en faisant des kōgi spécifiquement à cet effet.

Le contenu

Des notes qui sont parvenues, des kōgi publiés, il est possible de déduire que les sujets étaient extrêmement variés : technique du jūdō, philosophie, politique, société, randori, attitude, éthique, éducation… tout ce qui pouvait préoccuper Kanō Jigorō et ouvrir l’esprit de ses élèves, créer une interrogation chez eux était bon.

Il arrive par ailleurs à Kanō Jigorō d’utiliser le mot kunwa (訓話), discours moralisateur, pour désigner certains types de kōgi.

Depuis la fondation du Kōdōkan, dans le dōjō, en tant que shihan, je donne parfois une conférence ou je fais un discours moral. Parfois je démontre le principe d’une technique, je montre le véritable kata, parfois j’explique le véritable sens du jūdō, parfois je parle de la bonne façon dont on doit se comporter dans la vie en tant que membre du Kōdōkan ou en tant qu’homme.

C’est parfois fort général, comme cela peut être très pointu. Kanō Jigorō précise à ce propos qu’il y a deux types de kōgi, l’un est orienté vers les pratiquants, ceux qui connaissent déjà et à qui il faut proposer un approfondissement. L’autre s’adresse à des personnes qui ne connaissent pas le jūdō, et il s’agit alors de présenter la discipline. Nous retrouvons donc dans le kōgi de jūdō à peu près la même division que dans le monde universitaire entre l’exposé d’une problématique pointue et le cours magistral qui vise un public moins spécialiste.

Il y a deux façons de faire k ō gi, parmi lesquelles il faut choisir. L’une s’adresse à ceux qui pratiquent le jūdō (abréviation de Kōdōkan jūdō) et est principalement tournée sur le fait d’enseigner la méthode ou l’ordre de la pratique et l’autre consiste essentiellement à expliquer ce qu’est le jūdō à des gens qui n’ont pas l’intention de pratiquer eux‐mêmes mais veulent savoir de quoi il s’agit : ce sont les deux façons.

En d’autres termes, le kōgi s’attaque au projet d’éducation intellectuelle et morale chitoku-iku 智徳育 des pratiquants, ainsi qu’à la diffusion à la société en générale d’une vision juste de ce qu’est le jūdō.

Un exposé dans les règles de l’art

Pour faire un bon exposé, il faut avoir défini un but ainsi qu’un parcours pour amener l’auditeur là où on le souhaite. Il faut avoir choisi les outils nécessaires et savoir expliquer leur emploi et leur pertinence aux élèves. Il faut également, pour cela, disposer du temps nécessaire.

[…] pour ce qui est du renforcement du corps, si on ne pratique pas en prenant en compte la physiologie, on ne peut pas arriver à quelque chose de juste. Pour ce qui est du renforcement spirituel, si on ne connaît pas parfaitement les bases de la psychologie et de l’éthique, de nombreuses choses sont difficiles à comprendre. C’est pourquoi les connaissances de la physiologie, de la psychologie, de l’éthique, entre autres, sont nécessaires à tout pratiquant de jūdō un tant soit peu avancé. Toutefois, faire comprendre ces sciences sommairement est impossible en les expliquent entre les randori ou les kata. Il y a de toute façon besoin de réserver un temps spécial pour faire kōgi.

[…] même pour bien faire comprendre une clé de bras aussi simple qu’ude hishigi, il faut expliquer la forme de l’os, le travail des ligaments du point de vue de l’anatomie ou de la physiologie et, par exemple, le principe du levier selon les sciences physiques. D’autre part, si l’on veut enseigner la nécessaire maîtrise de son esprit en combat, naît la nécessité d’expliquer en faisant appel à la psychologie ou l’éthique.

Kōgi : l’ambition

L’ambition est simple : comme à chaque fois chez Kanō Jigorō, et comme le traduit le terme kōdō 講 道 de Kōdōkan, il s’agit de « rendre le principe manifeste ».

Le but du kōgi n’est pas simplement d’expliquer le jūdō. Il ne s’agit pas du principe transcendant au jūdō, cela ne représente qu’une première étape. Il s’agit du principe qui permet de devenir quelqu’un de bien et d’utile dans la société, au travers de l’expérience du combat.

Qui plus est, comme le renforcement de l’esprit et du corps du jūdō renforce évidemment pour donner des hommes bons, des hommes utiles, à chaque bonne occasion, il est nécessaire de faire entre autres des kōgi adaptés pour guider les hommes biens et faire des hommes utiles. Quand il y a rencontre par exemple et que le cœur des pratiquants est exalté, il faut faire un discours adapté à cette situation, ou dans des circonstances comme les jours de fête, ou à l’ouverture du kangeiko, il faut faire un discours en fonction, ou sinon, qu’il s’agisse de loyauté, de patriotisme, de rester fidèle à ses principes et suivre la voie de la vertu, s’il y a une occasion d’éduquer les sentiments que l’on doit éduquer chez un homme, on doit utiliser ce moment et faire un kōgi. Au quotidien, il est nécessaire d’être attentif à faire de temps en temps des kōgi pour faire comprendre ce que doivent être les règles générales pour un homme quant à sa tenue et ses manières.

Les débuts

Le kōgi apparaît au tout début de la fondation du Kōdōkan jūdō, sans doute dès 1882. N’y assistent pas seulement les membres du Kōdōkan mais aussi ceux du Cours Kanō.

Les élèves du Cours devaient se rendre tous les jours, quel quʹil soit, au dōjō. Puis, le dimanche, tous se rassemblaient et je faisais un discours moral sur la conduite quotidienne ou les secrets du comportement.

Nous pouvons supposer que ces kōgi faisaient aussi office de première présentation permettant à Kanō Jigorō de tester son discours et l’organisation de sa pensée, avant de les confronter à la critique d’un public plus sévère, plus large, non a priori acquis à la cause du jūdō.

Si vous souhaitez en apprendre un petit peu plus, consultez les numéros 3 et 7 de la revue Nihon bungaku. S’y trouve le texte d’un cours (kōgi) que j’ai fait autrefois au Kōdōkan à propos du développement historique du jūjutsu.

Les traces d’une continuité

Mais, en l’absence de témoignages, il est difficile de savoir combien de temps cette habitude de la cérémonie dominicale se perpétue. Sans doute quelques années, vraisemblablement jusqu’au départ de Kanō Jigorō pour l’Europe en 1889.

Par la suite, on sait que Kanō Jigorō faisait des discours quotidiens – à l’exception du dimanche ! – pour les pratiquants de Kumamoto400, où il est en poste d’août 1891 à février 1893.

Le professeur Kanō, les autres jours que le dimanche, avant les cours de l’école, réunissait tous les matins les élèves dans le Zuihōkan401 et faisait un cours spécial d’éthique.
[Murakawa Kengo]

On sait aussi que cette habitude du cours magistral n’a jamais quitté Kanō Jigorō :

Dans le dōjō, de temps en temps, il réunissait plusieurs dizaines d’étudiants de jūdō, parfois plusieurs centaines et nous entretenait de la théorie du jūdō, ainsi que de pensée générale et de formation du caractère.

Les traces d’une discontinuité

La citation précédente, par l’expression « de temps en temps », montre que cet exercice n’a pas conservé sa régularité des débuts. Kanō Jigorō le confirme d’ailleurs :

Il m’est arrivé, pendant certaines périodes, de définir une heure et de faire cela comme une suite. Parfois je me suis fait remplacer par des élèves avancés à qui j’ai fait faire la même chose.

Car Kanō Jigorō est très occupé. Il voyage beaucoup, fait mille choses en parallèle. D’autre part, peu de gens assistent à tout. Il nous semble qu’il devait lui être plutôt difficile de tenir un discours suivi – comme devant un public captif. C’est de là que lui vient l’idée de publier des articles dans des revues plutôt que de donner des cours ou des conférences. Fin 1898 puis – après une interruption de près de dix années – à partir de 1915, il s’attache à l’écriture de nombreux articles destinés aux jūdōka d’une part, ainsi qu’aux non-jūdōka.

Il crée ainsi quatre revues. Bien entendu il n’en est pas le seul collaborateur, mais il publie habituellement un article par numéro. Ce faisant, il répond à la seconde partie de la définition de la première acception du terme kōgi donnée par le Kanji-gen : « Ou encore, ces explications publiées en un ouvrage ».

Kanō débute ainsi dès le second numéro de la revue Kokushi (novembre 1898) une série d’articles appelée Kōdōkan jūdō kōgi 講道館柔道講義, Kōgi du / sur le Kōdōkan jūdō406, et qui commence par ces mots :

A partir d’aujourd’hui, j’ai l’intention de commencer un kōgi sur le Kōdōkan jūdō.

Cette revue s’interrompt avec le numéro 63, en décembre 1903. Arima Sumitomo, dans ses deux ouvrages publiés en 1905, ne fait pas référence à cet exercice du kōgi. Ce terme était-il réservé à Kanō Jigorō ? L’habitude s’en était-elle (déjà) perdue ?

Plaidoyer pour un retour du kōgi

Plus tard, notamment dans son article « Encourager la pratique du kata pour tous les pratiquants » (« Ippan shugyōja ni kata no renshū o susumeru 一般の 修行者に形の練習を勧める ») de novembre 1921408, Kanō Jigorō revient sur le kōgi et encourage à sa mise en application. Peut-être y avait-il chez lui, plus jeune, un souci d’exigence, l’idée qu’il fallait que l’intervention soit chaque fois brillante, pertinente, percutante. Peut-être en vieillissant a-t-il pris confiance dans l’exercice en lui-même, le considérant comme une possible source d’éveil ou d’interrogations pour les élèves, ainsi que comme l’occasion d’un travail, source d’efforts et de progrès, pour les enseignants.

Ainsi, au-delà du plaisir du fondateur du jūdō à faire part de ses réflexions, le kōgi poursuit d’autres buts. Il s’agit en effet d’ouvrir les élèves à la réflexion de façon globale, de les encourager à entreprendre la pratique du jūdō selon un autre angle, très différent, hors du tapis. L’objectif est de les amener à saisir que le but du jūdō est d’en comprendre le principe, mais aussi d’apprendre à mieux vivre en société. Ainsi le kōgi doit-il leur permettre de s’interroger quant à leur pratique : ce qu’ils sont en train de faire, leur attitude, leur responsabilité d’individu, au sein du groupe, de la société, du monde.

S’adressant aussi bien aux spécialistes qu’aux débutants, à ceux qui pratiquent le jūdō qu’aux autres, le kōgi a pour objectif d’ouvrir ses auditeurs à une meilleure compréhension de ce qu’est le jūdō, dans le dōjō comme en dehors. Le kōgi est aussi un appel à l’exigence. Il est lui-même exigence par la préparation qu’il demande, par le choix des outils ainsi que leur organisation pour convaincre. C’est une invitation faite aux élèves d’employer leur intelligence, leur concentration, de les inviter à imiter, à réfléchir, à mettre en doute, à remettre en question, à aller plus loin.

C’est aussi la démonstration que Kanō Jigorō considère le jūdō comme une science et de façon scientifique, ce qui tranche avec la conception que ses professeurs avaient du jūjutsu car, comme le rappelle Murata Naoki, le kōgi est aussi le contre-pied de ce que Kanō Jigorō a subi dans ses années d’apprentissage en jūjutsu, où réfléchir, se poser des questions, était mal vu.

[…] lorsqu’il [Kanō Jigorō] pratiquait le jūjutsu de l’école Tenjin shin.yō et qu’il demandait à son professeur « comment est‐ce que vous avez fait ça ? », il recevait, pour toute réponse, « Quoi ?! Même si je vous l’expliquais, le comprendriez‐ vous ? Il faut juste répéter, allez, venez ! » et il se relevait pour être à nouveau projeté. De même, lorsqu’il étudiait le jūjutsu de l’école Kitō, c’est par lui‐même qu’il a découvert ce mouvement nouveau de « kuzushi » qui permet de rendre facilement la technique décisive en déstabilisant un instant la position du centre de gravité de l’adversaire et qu’il a réussi à en élaborer le principe technique, sans que jamais cela ne lui soit enseigné par son professeur. En d’autres termes, c’était comme si personne n’enseignait rien par la parole. Il faisait à cette époque partie des rares élites issues d’une université publique. Son esprit étant extrêmement lucide, c’est sans doute le fait que personne n’enseigne quoi que ce soit par la parole qui a été la cause d’une forte insatisfaction, d’exaspération, et d’inévitables grincements de dents. Cette intelligence, cette culture, ne peuvent pardonner la confusion et l’irrationnel. « Jamais je ne reproduirai cela dans mon enseignement, qui se basera sur des principes scientifiques. Le Kōdōkan enseignera en tout selon le principe… » Sans doute ses mots diffèrent‐ils mais il ne fait aucun doute que c’est de l’expérience de sa période de pratique que l’idée selon laquelle « dans le Kōdōkan que j’ai bâti et dirige, l’enseignement se fait selon une nouvelle méthode » lui est apparue comme la bonne réponse et s’est profondément inscrite en lui. C’est pourquoi il a introduit la méthode dite « kōgi » dans l’enseignement de jūdō […]
[Murata Naoki]